
En coulisse
TV 8K avec la 5G de Huawei : que nous cache-t-elle ?
par Luca Fontana
Les TV 8K font sensation dans l'industrie télévisuelle. Mais il y a tout de même deux problèmes : le manque de contenus 8K et la bande passante trop faible. Au moins pour ce dernier point, on devrait déjà avoir trouvé la solution : la 5G.
La 5G est sur toutes les lèvres, y compris dans le secteur des TV. Ce nouveau standard de téléphonie mobile ultrarapide devrait prochainement faire son entrée dans l'industrie des téléviseurs 8K. Nous vous parlions déjà des projets de télévision 8K 5G de Huawei en mai dernier.
Sharp a présenté des projets similaires à l'IFA de Berlin: le fabricant japonais veut même exploiter l'ensemble du processus de production 8K avec des solutions matérielles et logicielles - de la caméra à l'appareil de lecture en passant par le logiciel de traitement. Dans un communiqué de presse publié par SK Telecom – l'une des plus grandes sociétés de télécommunications de Corée du Sud – Samsung a également annoncé l'arrivée prochaine de téléviseurs 8K compatibles 5G sur le marché asiatique.
Passionnant, ce sera la première fois qu'on construit des téléviseurs qui peuvent se connecter au réseau mobile. La raison : la bande passante.
La 5G devrait donc simplifier le cheminement des données entre les FAI et la TV et, symboliquement parlant, transformer le chemin à travers champ en une autoroute à huit voies. Swisscom par exemple, a permis à de nombreux foyers en Suisse de bénéficier d'une meilleure bande passante en étendant son réseau de fibre optique. Concrètement, vous pouvez visualiser la bande passante comme suit :
Le problème : la pose, l'exploitation et l'entretien des réseaux de fibre optique - ou du moins des fils de cuivre décents - dans tout le pays sont fastidieux et surtout coûteux. Les habitants de la commune saint-galloise d'Eggersriet attendent encore aujourd'hui l'installation d'internet à une vitesse de 80 mégabits par seconde minimum. La Suisse fait cependant toujours partie des pays les mieux connectés. Si on s'intéresse au réseau de fibre optique à l'échelle mondiale, c'est encore plus complexe. Par exemple, en Chine ou aux États-Unis. Il faudra probablement des décennies avant que la majorité des foyers de ces pays soient connectés au réseau internet haute vitesse par câble.
De plus, de nombreux goulots d'étranglement dans l'infrastructure limitent la bande passante disponible dans votre maison. Prenons l'exemple suivant : Samsung veut vous envoyer un paquet de données mis à l'échelle en 8K sur un serveur sud-coréen.
Pour plus de clarté : le serveur de Samsung est connecté par l'intermédiaire d'un fournisseur d'accès Internet (FAI ou ISP en anglais) sud-coréen tel que SK Telecom à une dorsale internet (Internet backbone en anglais). Transmis via la dorsale internet, le paquet de données atteint un FAI suisse en Suisse. Dans notre exemple, Swisscom. Entre les deux FAI en Corée du Sud et en Suisse, il existe de nombreux Internet exchange points (IXP), points d'échange internet et nœuds en français, qui assurent l'échange de données entre les FAI dans la dorsale internet.
Le FAI suisse envoie ensuite le paquet de données à un fournisseur régional près de chez vous. De là, le paquet est acheminé jusqu'à votre domicile. Il atterrit alors dans votre modem. Le modem convertit le signal et l'envoie au routeur. Le modem et le routeur sont souvent intégrés dans le même appareil : votre box internet. Le routeur envoie ensuite le paquet de données à votre téléviseur via LAN ou WLAN vers le modem de l'appareil intégré à votre téléviseur. Le modem de l'appareil traite le signal et décode le paquet de données.
Si au lieu d'utiliser le réseau internet, le paquet de données passe par le réseau mobile pour arriver en Suisse, notre schéma est radicalement différent :
Au début, rien ne change. Samsung envoie le paquet à un FAI sud-coréen, de là, le paquet est transmis à un FAI suisse via la dorsale internet et les nombreux IXP. C'est ensuite que les choses se pimentent : le FAI suisse envoie le paquet de données via le réseau 5G directement au modem de votre téléviseur.
C'est tout.
La 5G dispose donc non seulement d'une bande passante bien plus grande que la fibre optique, mais elle a aussi l'avantage de compter beaucoup moins de goulots d'étranglement limitant la bande passante.
Dernière précision : les schémas et processus décrits ci-dessus sont grandement simplifiés. La réalité est beaucoup plus complexe. Mais c'est suffisant pour comprendre les avantages d'un téléviseur 5G.
Les fabricants de TV 8K se préoccupent plus de la bande passante que du manque de contenus 8K. Les journalistes et experts du domaine font souvent le reproche aux fabricants de faire la publicité des téléviseurs 8K, alors qu'ils ne s'agit en fait que de mise à l'échelle de contenus Full HD et Ultra HD par de puissants processeurs.
De plus, jamais à court d'idées, les équipes marketing sont astucieuses et inventent des termes comme « Upscaling par IA ». Tout cela pour s'assurer que le client soit convaincu d'obtenir une qualité en tout point comparable à la vraie 8K. Pour les fabricants, il est bien plus simple – et probablement aussi plus efficace – que les calculs se fassent sur des serveurs en Corée du Sud, au Japon, en Pologne ou ailleurs, plutôt que sur les téléviseurs.
Cela tient d'une part à l'infrastructure plus performante mise à disposition. Et d'autre part, au fait que les téléviseurs n'auraient plus besoin de calculer eux-mêmes. Les TV seraient alors simplement composées d'un écran et d'un pied. Il serait alors possible de créer des formes et design complètement nouveaux. Il en va de même pour les smartphones : le matériel et l'électronique pourraient être réduits au strict minimum, et peut-être même être installés directement dans le cadre. Comme le prototype de TV OLED transparente de Panasonic - sans perte de performance au détriment de la qualité de l'image.
Aux yeux des fabricants, le design devient presque aussi important que la qualité d'image et cela se reflète dans leurs campagnes marketing. On le note notamment avec des TV comme « The Frame » et « The Serif » de Samsung ou encore avec la TV OLED de LG.
Mais ce ne sont que des suppositions. En tout cas, tant que l'envoi des paquets de données résultant des calculs sur les serveurs via internet se fait dans des délais raisonnables.
Bien entendu, certaines données sont déjà échangées entre les téléviseurs et les fabricants via internet. Par exemple, dans le cas du fameux AI Upscaling de Samsung ou LG. Mais le manque de bande passante de l'appareil et du réseau domestique limite la qualité de la mise à l'échelle qui pourrait certainement être meilleure et s'approcher de la véritable qualité du 8K si la bande passante pour la transmission de données était nettement plus élevée.
Et même sans les serveurs et l'upscaling : si, contre toute attente, Hollywood, Netflix et cie commençaient à produire des contenus 8K natifs, la bande passante dans la plupart des foyers ne suffirait pas pour diffuser les données directement sur la télévision. C'est en tout cas ce que montre le rapport State of the Internet publié en 2017 par Akamai.
Les fabricants de TV ne savent pas encore quelle sera la technologie d'avenir pour la transmission de contenus 8K sur leurs TV. Nombre d'entre eux envisagent la 5G, norme qui pourrait effectivement rendre possible la mise en réseau de l'électronique grand public promise par les fabricants depuis tant d'années. En un mot la domotique. Dans le cas de Huawei, la rumeur laisse même entendre que l'adaptateur 5G du téléviseur est à la fois un modem et un routeur pour les appareils électroménagers environnants. Cela ferait de la télévision 5G le point central de la maison connectée.
Mais c'est un autre sujet...
Vivre des aventures et faire du sport dans la nature et me pousser jusqu’à ce que les battements du cœur deviennent mon rythme – voilà ma zone de confort. Je profite aussi des moments de calme avec un bon livre sur des intrigues dangereuses et des assassins de roi. Parfois, je m’exalte de musiques de film durant plusieurs minutes. Cela est certainement dû à ma passion pour le cinéma. Ce que j’ai toujours voulu dire: «Je s’appelle Groot.»