
En coulisse
Patrick Mayer rêvait de devenir snowboardeur professionnel ; il est entrepreneur en fauteuil roulant
par Patrick Bardelli
La presse à cuisses du futur est déjà là. Développée entre Zurich et le Japon par l'entreprise Dynamic Devices AG, elle porte le nom de ddrobotec. J'ai eu la chance de pouvoir la tester et de découvrir la musculation du futur.
« Never skip leg day » figure parmi les nombreuses règles d'or de la musculation. Les jambes, c'est sacré. Mais, entre nous, qui aime s'asseoir sur la presse à cuisses et pousser des dizaines de kilos, le visage déformé par la douleur ? L'avenir des séances de sport sera ludique, garanti sans blessure et, grâce à l'intelligente artificielle, bien plus efficace qu'aujourd'hui.
L'entreprise Dynamic Devices AG fabrique des produits pour l'industrie du sport depuis maintenant dix ans. Les membres de l'équipe suisse de ski ont déjà utilisé leurs équipements pour se préparer à la coupe du monde. Nous sommes peu nombreux à pouvoir descendre le Lauberhorn à Wengen ou la Streif à Kitzbühel. Mais comme nous vivons tous dans un monde régi par la gravité, nous avons besoin de muscles sains et forts. Et pour être sûr de pouvoir se relever des toilettes à 85 ans, il nous faut un minimum de force.
« Comment amener à la musculation les personnes qui ne s'y intéressent pas du tout ? » Telle est la question que Max Lungarella et son équipe se sont posée en 2014. « Notre objectif était de développer un système destiné à rendre les séances de musculation faciles et amusantes, tout en assurant un entraînement de qualité. » Le concept de cette toute nouvelle presse à cuisses a ensuite été conçu en collaboration avec l'École Polytechnique Fédérale de Zurich, entre autres. Max Lungarella sourit : « C'est le cerveau de Marco Toigo, physiologiste du sport à l'EPFZ, qui se cache derrière notre presse à cuisses. Il a été à nos côtés pendant toute la conception de l'appareil. »
Le cœur de la presse se compose de deux muscles artificiels, des éléments d'entraînement qui se contractent sous la pression de l'air. Ils se comportent comme de véritables muscles. Le côté artificiel se trouve dans la régulation du système. « C'est un processus complexe. Il nous a fallu 10 ans pour perfectionner le fonctionnement de ces éléments de robotique molle », explique Max Lungarella.
La machine s'accompagne également d'un logiciel que l'on peut gérer facilement via une appli et qui permet de personnaliser ses séances d'entraînement. Lorsque je rétorque que cela constitue déjà la norme et que n'importe quelle salle de sport vante ses entraînements personnalisés, Max prend une grande inspiration, puis me répond : « Imaginons que vous souffrez de troubles neurologiques, par exemple de neuropathie. On peut donc supposer que vous vous rendez souvent chez un neuro-kinésithérapeute. Votre maladie, il la connaît bien, mais on peut rarement en dire autant pour la musculation. Dans l'idéal, il devrait posséder des connaissances de spécialiste du sport et de médecin. Ce n'est malheureusement pas le cas de la plupart des thérapeutes. Et c'est là que notre système entre en jeu. Nous élaborons par exemple des plans d'entraînement pour des patients atteints de troubles neurologiques et nous les aidons à remarcher. »
Max poursuit avec un exemple concret dans un autre domaine : « Un kinésithérapeute suisse nous a demandé de mettre en place une thérapie musculaire que les personnes âgées de plus de 75 ans pourraient réaliser sur notre presse à cuisses. En nous basant sur toutes nos données, nous élaborons ainsi un plan adapté qui est accessible à tous nos clients dans le monde entier depuis le cloud. Un kinésithérapeute au Japon qui travaille avec notre appareil dispose ainsi d'un traitement validé par un hôpital suisse qu'il peut utiliser pour soigner ses patients de 80 ans. C'est ça, le sport du XXIe siècle. Et je pense que cela participe aussi à la démocratisation du savoir-faire. »
Musculation pour les athlètes ou les seniors dans la force de l'âge, utilisation thérapeutique pour personnes âgées ou patients atteints de troubles neurologiques : tout est possible. Je me pose sur la machine et décide de la tester par moi-même.
Je fais des exercices avec la jambe droite, la gauche, les deux. Je surmonte la charge, lui résiste, ou je maintiens la position. Les muscles de mes jambes travaillent donc de manière concentrique, excentrique et isométrique. Ces termes vous parlent peut-être si vous utilisez eGym à la salle de sport. Il faut faire monter, descendre ou maintenir le point. Moi aussi, je connais ça : aller de machine en machine et arriver à la fin de la séance sans savoir si tout ça était utile.
Ici, c'est complètement différent. Après quelques minutes, Max me fait remarquer que quelque chose semble clocher avec mon genou gauche. Sur un exercice, j'atteins les 1 500 watts avec ma jambe droite, alors que ma jambe gauche ne dépasse pas les 1 200 watts. Les courbes bleue (jambe gauche) et rouge (jambe droite) devraient être parallèles. Chez moi, ce n'est pas le cas. Outre la douleur diffuse dans mon genou qui m'accompagne depuis plusieurs semaines, j'ai maintenant la preuve bleu sur noir que quelque chose ne va pas. Allô, docteur ? Ce serait pour prendre rendez-vous.
À part ça, j'ai l'air de fonctionner plutôt pas mal. Max se montre satisfait de ma performance et me laisse ramasser les billes d'argent en mode jeu et descendre la piste avec le pingouin. Une fois mon entraînement d'une demi-heure terminé, je sors de la presse à cuisses plein d'entrain, mais suis forcé de m'asseoir aussitôt. C'était ludique, mais je me suis quand même bien dépensé.
Dynamic Devices produit deux modèles en série de marque ddrobotec. Le petit modèle « Pro » peut être utilisé dans des cabinets médicaux, pour les e-sportifs, les personnes âgées ou les enfants. Selon Max Lungarella, il coûte environ 70 000 francs. Le plus gros modèle, « Elite », sur lequel je me suis entraîné, coûte dans les 90 000 francs. Il a été conçu pour le conditionnement neuro-athlétique, l'amélioration des performances, le diagnostic interactif et pour créer des programmes d'entraînement pour sportifs de haut niveau. Parmi ses clients, Dynamic Devices compte entre autres le groupe Redbull ou la fédération japonaise de ski. Et si quelqu'un a 90 000 francs en trop, Patrick Bardelli pourrait aussi en faire partie.
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Ancien journaliste radio devenu fan de story telling. Coureur confirmé, adepte du gravel bike et débutant en haltères de toutes tailles. Quelle sera ma prochaine étape ?