
En coulisse
Ranger les LEGO, mode d’emploi
par Martin Jungfer
Il n'y a pas que les enfants qui aiment les LEGO, les adultes aussi, à en juger par l'immense communauté de fans. Et Thomas en fait partie. Il possède déjà plus de 100 kilos de briques, et c'est loin d'être fini.
Jusqu'à l'âge de douze ans, Thomas joue aux LEGO puis finit par s'en désintéresser. Après 20 années de « Dark Times » − comme Thomas appelle cette période où il n'a pas touché à une seule brique −, son frère lui offre une maison LEGO pour Noël. C'est le déclic, l'étincelle qui ranime en lui la fièvre des LEGO. Mais sa passion l'envahit vraiment il y a trois ans alors qu'il déménage avec sa famille dans un nouvel appartement qui possède une cave qu'il aménage pour ses LEGO.
Je rencontre Thomas un des jours les plus chauds de l'année. Le thermomètre dépasse les 30 degrés. À peine arrivé, il me met une glace dans la main. Les perles de sueur sur mon front sont plus évocatrices qu'un long discours. Après ce petit en-cas rafraîchissant, Thomas et moi descendons l'escalier jusqu'à la cave. Outre les vitrines de LEGO, cette dernière abrite un coin travail surplombé de tiroirs renfermant des pièces individuelles bien rangées, une table couverte de bâtiments en LEGO et une immense armoire à quatre portes remplie de boîtes LEGO encore fermées qui retiennent mon attention : « Je n'ai pas encore eu le temps de toutes les assembler », explique Thomas, « mais il y en a qui resteront comme ça, scellées, dans leur emballage d'origine. Il faut les voir comme un investissement. » Les maisons LEGO Ideas et les sets comme les gares et les hôpitaux − raretés que LEGO cultive − prennent de la valeur avec le temps. Je demande à Thomas de combien de sets LEGO sa collection se compose. Sa réponse :
« j'ai perdu le fil. Je ne sais plus combien j'en possède. Mais certainement plus de 100 kg. »
En plus des rayons des grands magasins, Thomas parcourt aussi souvent l'offre sur de célèbres plates-formes de marchandises d'occasion. De temps en temps, il dégote des trésors, lance-t-il. Qu'il s'agisse de sets anciens et rares, de briques uniques ou de collections entières, tout peut s'acheter aux enchères : « J'ai récemment acheté 30 kg de briques, que j'ai d'abord dû laver avant de pouvoir les trier. » Laver ? Selon Thomas, les vieilles briques LEGO sont parfois dans un piteux état. Souvent jaunies, elles ont besoin d'une petite cure de rajeunissement. Thomas a développé sa propre technique avec un remède maison. Pour les remettre en état, il a recours à des pastilles de nettoyage pour prothèses dentaires ou à du vinaigre naturel par exemple. Il y a quelque temps, Thomas en a parlé à un autre collectionneur LEGO, un dentiste qui lave ses briques à l'aide d'un appareil à ultrasons. C'est la meilleure méthode et la plus simple.
Dans l'énorme quantité de briques, on ne trouve aucun LEGO Technic. Cela me surprend, car je trouve que cette gamme est l'une des plus captivantes. Thomas n'est pas d'accord. Il n'a jamais accroché avec les Technic. Il préfère de loin les briques classiques. Il ne se limite pas à une certaine série de l'univers LEGO. Il en a à la pelle. Chez lui, j'ai surtout remarqué LEGO City, Ideas, Ninjago et Creator. Outre ses modèles militaires, Thomas s'intéresse particulièrement aux bâtiments.
Son but est de construire une ville entière dans les moindres détails. Et il est sur la bonne voie. Dans un coin de la pièce, il y a plusieurs tables couvertes de rangées entières de maisons bordant une rue très fréquentée. On peut également voir deux trains assurant les transports publics, un grand porte-conteneurs chargé par une grue au port. En y regardant de plus près, je découvre de plus en plus de détails : par exemple, Batman torse nu et une femme debout à un carrefour avec son landau.
LEGO n'a pas l'apanage des briques. Mais Thomas ne possède que des LEGO : « Jusqu'à présent, je n'ai jamais touché une brique Cobi et cie. Il y a certainement d'autres fabricants qui proposent des briques de haute qualité. Mais, à mes yeux, LEGO a les meilleures figurines qui soient. Aucun autre fabricant ne lui arrive à la cheville. » On ne peut pas être plus fan !
Mais « LEGO n'est pas toujours parfait », admet Thomas. En dépit de sa taille – ou peut-être grâce à elle justement –, la firme danoise a de la marge question progression. Thomas me donne plusieurs points que LEGO néglige à son avis. Premièrement, la politique des prix : ils sont élevés et pas du tout justifiés. Deuxièmement, il aimerait que LEGO refasse plus de bâtiments, plus de chemins de fer et réintègre les anciennes séries comme le bateau pirate ou encore le château. Troisièmement, LEGO cible fortement les enfants. Le marché des fans adultes de LEGO, pas assez pris au sérieux selon Thomas, recèle un énorme potentiel. Par exemple, si je veux construire un hôpital pour ma ville, je dois acheter cette boîte en trois exemplaires afin de construire un grand bâtiment ». Pour de tels sets, mettre la main au portefeuille ne le dérange pas.
Malgré toutes les suggestions d'amélioration, Thomas reste fidèle à LEGO. Il est dévoré par la fièvre de la brique. Ses deux fils y jouent aussi, mais n'ont pas encore découvert l'amour pour ces LEGO. Le cadet de deux ans est encore un peu trop jeune et l'aîné de cinq ans n'a pas la patience : « Quand je construis un modèle avec lui, il est tout feu tout flamme à la première page d'instructions. Mais à la deuxième, c'est une autre paire de manches », me confie Thomas. Mais ne soyons pas pressés, ça viendra ! Ils sont encore jeunes après tout et ils ont tout le temps de s'y intéresser.
Je profite de ma liberté sur ma moto, réveille mon instinct de chasseur à la pêche et laisse libre cours à mon imagination derrière la caméra. Je suis payé pour faire tout et n’importe quoi avec des jouets du soir au matin.