
En coulisse
OLED et burn-in: ce qu'il en est des pixels brûlés
par Luca Fontana
Les micro LED sont l’avenir des technologies d’affichage. C’est indéniable et les fabricants comme Samsung ou même LG, le pionnier de l’OLED, nous le prouvent en investissant des millions dans cette technologie. Je ne suis cependant pas tout à fait convaincu et ose faire un pronostic.
OLED, la technologie d’affichage utilisant des pixels autoémissifs, semble régner en maître sur le secteur TV. Et ce probablement parce qu’elle offre actuellement la meilleure qualité d’image. LG Display, succursale de LG, a le monopole sur cette technologie et fourni tous les fabricants de téléviseurs OLED.
Au début de l’année, Samsung a cependant réussi à coiffer la concurrence au poteau en présentant «The Wall», un téléviseur micro LED de 146 pouces, lors du CES 2018. Objectif assumé: remplacer l’OLED. Six mois plus tard, LG a profité de l’IFA 2018 pour présenter sa réponse: un téléviseur micro LED 175 pouces.
C’est à qui aura la plus grosse TV…
Pour les observateurs, cela ne se résumait cependant pas à un simple coup dur pour la concurrence, mais plutôt au désaveu de l’OLED qu’on prétendait jusqu’alors être le nec plus ultra des technologies d’affichage et se révélait en fait surpassé par une nouvelle technologie ultime.
Une question se pose alors: la micro LED va-t-elle écraser l’OLED?
Les micro LED sont en théorie comme des OLED – juste sans la partie organique. Souvent confondu avec «biologique» ou «naturel», le mot «organique» dans OLED prête à confusion. En chimie, l’anglais «organique» signifie que quelque chose contient du carbone. Les OLED utilisent en effet des connexions à base de molécules de carbone. Les micro LED utilisent quant à elles le nitrure de gallium, un matériau synthétique.
Les micro LED peuvent être beaucoup plus petites que les LED classiques, mais elles fonctionnent de la même manière. C’est-à-dire: chaque pixel est formé de trois sous-pixels, un rouge, un vert, un bleu. C’est la luminosité de chaque sous-pixel qui détermine la couleur du pixel. Et comme pour les OLED, les micro LED n’ont pas besoin de rétroéclairage, car elles sont également autoémissives.
Les micro LED devraient alors offrir les mêmes avantages que la technologie OLED et surtout, le noir parfaitement noir, sans en avoir les inconvénients. La technologie OLED a effectivement deux inconvénients majeurs:
Les micro LED ne connaissent pas ces problèmes. À cela s’ajoute que les LED synthétiques sont généralement bien plus lumineuses que les OLED: un téléviseur OLED affiche en moyenne 1000 cd/m² (unité de mesure de la luminance), alors qu’une dalle LED affiche 2000 cd/m². C’est particulièrement important lorsque vous regardez la télévision dans une pièce baignée de lumière.
Mais la forte luminosité a aussi ses inconvénients. En effet, les couleurs ont tendance à apparaître plus pâles lorsqu’elles sont trop lumineuses. Un problème bien connu pour les projecteurs. Les partisans du LCD rétorqueront que tout est une question de configuration.
On ne sait pas encore quand les micro LED feront leur entrée dans le monde des home cinémas. Samsung parle d’une attente de un à neuf ans, estimation qui nous montre que personne n’a aucune idée de ce à quoi s’attendre. Si je devais me prononcer, mon estimation serait plus proche des neuf ans. La technologie n’est pas encore assez mûre pour se révéler pertinente à court terme, du moins pour le home cinéma.
Cela tient surtout à l’assemblage modulaire des dalles micro LED: il n’est pas encore possible d’aligner toutes les micro LED sur un seul fond (Backpanel). Actuellement, les dalles sont en fait composées de plusieurs panneaux modulables. Les rapports du CES 2018 font souvent mention de liaisons visibles et gênantes entre les différents modules. Et ce surtout, lorsque des objets en mouvement passent d’un module à l’autre.
L’architecture modulaire de ces écrans est idéale pour les écrans LED très grands. Ils sont ainsi plus faciles à entretenir, si par exemple une micro LED vient à mourir, il suffit de remplacer le module concerné et non tout l’écran. De plus, plus on est loin de l’écran, moins les liaisons sont visibles.
Ces écrans géants pourraient être utilisés dans les stades ou dans des centres commerciaux pour des diffusions publiques, mais aussi dans les cinémas. Samsung est déjà à pied d’oeuvre «Onyx Cinema LED». Une seule sale en Suisse propose cette technologie, la salle 5 de l’Arena Cinema à Sihlcity. Manuel Wenk, producteur vidéo, et moi-même y sommes allés l’été dernier et avons pu jeter un œil dans les coulisses.
Nous avons particulièrement apprécié l’excellent rendu des couleurs. Il n’y a pas de mystère: Samsung couvre 120 % de l’espace de couleurs DCI-P3 avec ses micro LED.
Les espaces colorimétriques définissent le pourcentage de couleurs visibles par l’œil humain couvert. Les différentes sources de bonne ou moins bonne qualité ne couvrent pas les mêmes surfaces, par exemple un Blu-Ray ou un Blu-Ray ultra HD. L’espace DCI-P3 couvre environ 45 % du spectre visible pour l’œil humain et les contenus HDR couvrent environ 90 % du DCI-P3. Selon le fabricant, les OLED pourraient presque couvrir 100 % de cet espace colorimétrique si les contenus adaptés existaient. Mais elles seraient tout de même surpassées par les micro LED qui couvriraient 120 % de l’espace.
Il faudra certes attendre quelques années avant de pouvoir regarder des contenus avec de si grandes nuances dans les couleurs, mais nous avons le temps. La technologie micro LED n’en est encore qu’à ses débuts.
Samsung n’est pas le seul à penser à l’avenir proche. Le porte-parole de LG à l’IFA 2018 a confirmé que l’entreprise avait lancé divers projets pour le développement de la technologie micro LED. On attend toutefois encore une communication officielle de LG à ce sujet.
LG se lance dans une entreprise périlleuse. Il n’est certes pas déraisonnable de la part de LG de vouloir s’assurer une place sur ce tout jeune marché prometteur. Il s’agit de ne pas manquer le train, même si Samsung semble avoir pris de l’avance sur le sujet. Mais d’un autre côté, le groupe coréen risque de mettre en danger sa position de leader sur le marché de l’OLED. Nous ne savons en effet pas encore laquelle de ces deux technologies sera la meilleure et s’imposera sur le marché.
Mais attention: les fabricants sud-coréens ne sont seuls sur le marché, Sony et Apple ont aussi déjà investi plusieurs millions pour développer la technologie micro LED.
Apple essaie ouvertement d’intégrer la technologie à l’Apple Watch. Ça ne serait pas la première fois que le groupe californien teste une technologie d’affichage sur sa smartwatch: elle fut aussi le premier produit de la marque disposant de l’AMOLED en 2014, suivie trois ans plus tard par l’iPhone X. C’est aussi une manière pour Apple de chercher à se défaire de sa dépendance envers Samsung qui lui livre les écrans AMOLED. Sony est aussi très certainement mû par les mêmes motivations, car tous ses écrans OLED sont actuellement fabriqués par LG. Cette dernière a d’ailleurs présenté des panneaux micro LED modulaires en 2016, puis un écran 120 pouces vendu pour la modique somme de 500 000 CHF lors de l’ISE 2018.
Tous semblent avoir la même ambition: lancer une technologie micro LED viable sur le marché d’ici une dizaine d’années.
Samsung nous a laissés entrevoir l’avenir avec «The Wall», présenté en janvier 2018.La marque a annoncé la couleur et voulait nous faire savoir qu’elle était capable de fabriquer un tel écran qui, pour ne rien gâcher, a de la gueule. Ironiquement, le défi n’est pas de fabriquer des écrans micro LED toujours plus grands, comme j’ai pu le suggérer plus haut, mais plutôt de les rendre aussi petits que possible. Cela tient à l’architecture modulaire de ces écrans qui a tendance à donner de gros écrans.
La difficulté de la production réside dans la profondeur des pixels: plus l’écran est petit, moins il y a des place pour les pixels, chacun étant en plus formé de trois sous-pixels. Chaque sous-pixel doit être fabriqué séparément et calibré. Un tel projet est si complexe qu’Apple a failli abandonner il y a un an. Le groupe californien n’a réussi à percer que fin 2017.
On ne peut encore savoir si les micro LED seront un jour adaptées pour le marché du home cinéma. Le développement d’une technologie adaptée à ce segment prendra encore quelques années. Des années pendant lesquels le leader du marché OLED, LG, aura le temps de faire avancer la recherche sur les LED organiques et pourra améliorer sa technologie. D’autant plus que la production des micro LED synthétiques semble autrement plus complexe que celle des OLED. Cela aura forcément des répercussions sur le prix de la nouvelle technologie.
Dans l’état actuel des choses, les micro LED sont prédestinée aux grands écrans. De toute manière: tant qu’on ne sera pas capable de faire un écran micro LED d’un seul tenant, ou au moins avec des liaisons invisibles, la technologie ne percera pas dans le segment home cinéma. Voilà une chose dont je suis sûr.
Pour moi les micro LED sont une technologie plus qu’intéressante, mais simplement pas adaptée à l’usage domestique. D’où mon pronostic assez pessimiste (peut-être trop?). Je reviendrai sur cet article d’ici cinq à dix ans et je verrai bien si mon pronostic s’est confirmé.
Les micro LED vont-elles vraiment détrôner les OLED? J’en doute fort.
À votre tour de me donner votre opinion sur le sujet!
L'avenir des OLED est-il menacé par l'apparition des micro LED?
Le concours est terminé.
Vivre des aventures et faire du sport dans la nature et me pousser jusqu’à ce que les battements du cœur deviennent mon rythme – voilà ma zone de confort. Je profite aussi des moments de calme avec un bon livre sur des intrigues dangereuses et des assassins de roi. Parfois, je m’exalte de musiques de film durant plusieurs minutes. Cela est certainement dû à ma passion pour le cinéma. Ce que j’ai toujours voulu dire: «Je s’appelle Groot.»