
Test de produit
Vous n'avez pas d'idées pour l'anniversaire de vos enfants ? Pas de problème!
par Martin Rupf
Mon fils vient de fêter ses dix ans. Je profite de cet anniversaire pour faire le point. J’ai fait une liste de dix choses qui ne se sont pas passées comme je croyais.
Chaque fois que l’un de mes enfants fête son anniversaire, je repense au jour de sa naissance avec un sentiment mêlant nostalgie et gratitude, comme l’autre jour, quand mon fils a soufflé son premier chiffre rond de bougies.
Je passe donc en revue les dix dernières années. Je me concentre sur ce qui s’est réalisé, complètement ou en partie, et ce qui ne s’est pas réalisé du tout. Cela vous est certainement déjà arrivé. Avant la naissance de votre premier enfant, votre imagination de futur parent déborde de projets de famille. Des fragments de souvenirs, de récits et de désirs.
Vous serez sans doute d’accord avec moi pour dire que parfois, on est plus loin de la réalité qu’on ne le croit. Pour le dixième anniversaire de mon fils, voici ce dont je me suis rendu compte.
1. Le temps passe vite comme un éclair !
Combien de fois ai-je entendu d’autres parents me dire : « Profite de chaque instant. Avant même de t’en rendre compte, ils seront grands ». J’ai pris cela à cœur et j’ai essayé de profiter de chaque seconde dès la naissance de mes enfants. Mais plus ils grandissent, plus il devient difficile de profiter. Notre fille est née à peine deux ans après notre fils. Le temps s’est encore accéléré quand les deux enfants se sont retrouvés pris dans les rouages de l’école et des loisirs. On peut dire ce que l’on veut sur la vétusté du proverbe « le temps passe vite », on sous-estime sa pertinence. Je n’aurais jamais imaginé que le temps passerait si vite.
2. Les gènes jouent un rôle plus important que je ne pensais
J’ai été adopté par des parents bons et aimants que je n’ai jamais appelés beaux-parents ou parents adoptifs. C’est peut-être aussi pour cette raison que je ne m’étais jamais trop posé de questions sur les origines de ma personnalité. Il m’a été relativement facile d’accepter le décès de ma mère biologique au moment où je la cherchais et le fait que mon père était introuvable. Le fait d’avoir retrouvé mon demi-frère biologique a peut-être aussi aidé. Mais surtout, j’avais une famille intacte avec mes parents et ma sœur, également adoptée. Et donc, d’une certaine manière, la question de mes racines n’a jamais été présente, jusqu’à la naissance de mon fils. Tenir dans ses mains son propre sang en chair et en os pour la première fois est un des moments forts les plus beaux de la vie de parent. Dans mon cas, c’était sans doute encore un peu plus spécial. Pour la première fois, j’ai une relation avec un pair biologique à part entière. Cette relation avec mes deux enfants m’a ouvert les yeux sur l’importance des racines biologiques.
3. Mon fils n’aime pas jouer au ballon... et alors ?
Mon cœur de sportif chavire rien que d’entendre parler d’unihockey, de handball, de tennis de table ou de football. Quand je vois une balle, j’ai tout de suite envie de jouer avec. Je me voyais déjà jouer au baseball ou au football avec mon fils comme dans les films américains kitsch... Mais de toute évidence, les gènes de la balle sont restés de mon côté lors de la reproduction. À ce jour, mon fils est à peu près aussi habile avec un ballon qu’un sumo sur une corde raide. Il préfère la danse et le théâtre, par exemple. Mais il n’est pas le seul à me surprendre. Je me surprends moi-même, car jusqu’à aujourd’hui, je n’ai jamais forcé mon fils à faire ce qu’il n’aimait pas. Bon, de temps en temps, je lui propose de jouer au unihockey, sans succès jusqu’à présent, mais cela ne me chagrine pas plus que ça.
4. Pourquoi les autres sont parfois meilleurs que mon fils ?
J’ai des difficultés quand il s’agit de comparer mon enfant aux autres. Je pensais que je serais indifférent aux prouesses du petit voisin du même âge que mon fils. Mais l’avenir est parfois surprenant. Exemple numéro un : récemment, mon frère m’a dit que son fils n’avait que des six dans son bulletin scolaire, la meilleure note en Suisse. « Pourquoi mon fils n’a-t-il pas un seul six ? », me suis-je demandé. Exemple numéro deux : la fille du voisin est plus intrépide et a appris à faire du vélo plus vite que mon fils. J’ai fait semblant de partager la fierté de son père. En réalité, j’étais un peu jaloux. Exemple numéro trois : alors que mon fils descend la piste de ski de manière hésitante, il se fait dépasser par des enfants plus jeunes, tout schuss. « Est-ce que j’ai mal appris à mon fils à skier ? ». Dans toutes ces situations, j’ai honte intérieurement de projeter mon esprit de compétition sur mon fils. Ce n’était pas prévu.
5. Le problème du rôle de modèle permanent
Vous avez probablement déjà imaginé quel modèle de père ou de mère vous alliez devenir pour vos enfants. Nous avons tous·tes entendu quelque part que montrer le bon exemple ne passait pas par des actes héroïques ponctuels, mais plutôt par la constance et la bienveillance au quotidien.
Das Buch, von dem du dir wünschst, deine Eltern hätten es gelesen
Allemand, Philippa Perry, Jorge del Corral, 2021
Pour ma part, j’ai vite compris qu’être un modèle n’était pas si simple. Au contraire, pour être tout à fait honnête, je suis probablement plus souvent un mauvais qu’un bon modèle. Mes jurons sont beaucoup trop spontanés, je suis extrêmement impulsif et il m’arrive de hausser le ton plus fortement que nécessaire. Je perds patience bien trop souvent. Et je ne pourrai pas reprocher à mes enfants de passer tout leur temps sur leur téléphone portable, car c’est de moi qu’ils tiendront cette manie.
Dreissig Minuten, dann ist aber Schluss!
Allemand, Patricia Cammarata, 2020
Évidemment, il ne faut pas abandonner. On ne remarque que les trains en retard. Autrement dit, on oublie d’apprécier quand tout va bien et on se focalise sur ce qui va mal. Je me répète la phrase suivante pour ne pas perdre le nord : « Le fait que je ne sois pas parfait et que j’aie des défauts est justement la raison pour laquelle je suis un modèle pour mes enfants ».
6. « Pas de télé tant que ta chambre n’est pas rangée ! »
En tant que futur parent, vous avez peut-être lu des ouvrages spécialisés avant la naissance de votre premier enfant, à la recherche de conseils pour leur éducation.
L’un des principes que j’ai adoptés est de ne jamais soudoyer mes enfants pour les encourager à faire quelque chose. Je ne sais pas combien de fois j’ai rompu cette promesse. Dans le feu de l’action, il est facile de laisser sortir des phrases comme : « Pas de télé tant que ta chambre n’est pas rangée ! ». L’ennui, c’est qu’à long terme, les menaces (ou « conséquences », selon les familles) ne seront pas fructueuses, au dépit de leur efficacité à court terme. On ne devrait pas apprendre à s’exécuter uniquement par peur des conséquences.
7. Quand le héros devient soudain le papa gênant
Ah, comme j’aime me rappeler l’époque où j’étais le héros inconditionnel de mes enfants. Bien sûr, j’ai toujours su qu’un jour viendrait où l’image perdrait de son lustre... Mais je ne pensais pas me voir si vite qualifié de « gênant » par mon fils. Aujourd’hui, rares sont les situations où mon fils n’a pas honte de moi. Le pire, c’est quand me prend l’envie d’aller le chercher à l’école. Je peux croire que je suis un père jeune et cool aussi longtemps que je le voudrai, mais mon fils ne voit pas cela du même œil.
8. Les enfants sont un miroir ambulant. Pourquoi ça ne me plaît pas ?!
Avoir des enfants, c’est ne jamais savoir à quoi s’attendre. Mais c’est aussi la chance unique de changer, si possible en bien. Car les enfants tendent un miroir impitoyable à leurs parents. Ils et elles se le permettent et n’ont rien à craindre, certain·e·s de l’amour inconditionnel que leur portent leurs parents. Je me doutais bien que mes enfants me refléteraient aussi. Mais je n’aurais jamais imaginé que cela puisse être aussi énervant et douloureux. Pourquoi mon fils ne respecte-t-il pas les règles ? Est-ce que cela pourrait être dû au fait que je ne suis moi-même pas très à cheval sur les dites règles ? Pourquoi ma fille s’énerve-t-elle dès que quelque chose ne lui plaît pas ? Ce n’est certainement pas à cause de moi, qui suis toujours si détendu et équilibré. Serait-ce trop demander à mon fils de manger proprement ?! Évidemment, quand son père engloutit son repas comme si c’était une course...
Pire encore pour ce qui est de mettre un casque pour faire du vélo.
Quand vos enfants vous tendent un miroir, vous avez deux options. Vous pouvez vous énerver et leur mettre une rouste. Mais éventuellement, vous pouvez aussi essayer de vous défaire de vos mauvaises habitudes et de devenir une meilleure version de vous-même.
9. « Et alors, ça se passe bien à l’école ? »
Une règle d’or dans l’éducation des enfants est de ne jamais au grand jamais parler en mal des enseignants, de la direction de l’école ou du contenu des devoirs en leur présence. Car si nous, parents, n’avons déjà aucun respect pour l’institution scolaire et ses employés, comment pouvons-nous en exiger autant de nos enfants ? Je peine à vous avouer ce que je m’apprête à vous avouer. J’ai enfreint cette règle si souvent que c’est un miracle que mes enfants aiment toujours aller à l’école et ne fassent pas de doigt d’honneur à certain·e·s enseignant·e·s. Il m’est ainsi arrivé d’avoir la prétention d’écrire à une enseignante pour lui faire remarquer l’inutilité des devoirs qu’elle donnait et lui proposer des alternatives.
Je le confesse, il m’est arrivé plus d’une fois de parler avec mépris d’un·e enseignant·e. Le fait que la personne le mérite n’améliore pas la situation. L’été dernier, nous avons fini par intervenir auprès de la direction de l’école parce que nous n’étions pas d’accord avec la répartition des classes de notre fils. Celle-ci n’avait aucun sens. (...) Ne m’étais-je pas promis de faire preuve de retenue sur les sujets scolaires ?
10. Aimer à en perdre la raison
Attention : la fin de mon article atteint le summum du kitsch. Je me doutais qu’avoir des enfants allait redéfinir la notion d’amour, mais je n’avais pas idée que l’amour devenait si fort qu’il pouvait faire mal. Et le meilleur dans tout ça est que cet amour est réciproque. J’ai tellement d’amour pour mes enfants qu’on pourrait remplir une montgolfière avec. Inversement, que je sois gênant ou pas, je reçois de mes enfants plus d’amour que je n’aurais pu l’imaginer dans mes rêves les plus fous.
Vous savez maintenant sur quelles dix choses je me suis trompé et comment les dernières années avec mes enfants m’ont prouvé que j’avais tort. J’ai déjà hâte de vivre les dix prochaines années. Mon fils fêtera ses 20 ans. Mais je suis déjà sûr de deux choses. Alors que l’amour restera le même, je continuerai sans doute d’être le papa le plus gênant du monde aux yeux de mon fils. Mais je suis prêt à payer ce prix pour ce que j’ai de plus cher à mes yeux : mes enfants.
Photo d’en-tête : Martin RupfDeux fois papa, troisième enfant de la famille, cueilleur de champignons et pêcheur, spectateur hardcore, à moitié danois et champion du monde des gaffes.