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Il y a plusieurs mois, on parlait déjà du fait que notre tasse de café matinale nous coûte de plus en plus cher. La raison ? Les prix de la matière première ont augmenté sur le marché mondial. Les fabricants de café moins chers, en particulier, ont dû adapter leurs prix. Voici comment les spéculateur·rices, la météo et la qualité des grains déterminent le prix du café.
En janvier, la SRF a consacré un reportage au sujet intitulé « Migros und Coop erhöhen die Kaffeepreise »(la Migros et la Coop augmentent les prix du café). Dans ce reportage, on attribue la montée des prix aux intempéries au Brésil : une offre plus faible sur le marché fait grimper les prix. Comme le Brésil possède les plus vastes cultures de café du monde, la météo y a certainement un impact décisif sur les prix mondiaux de cette matière brute.
Le moindre changement au Brésil a-t-il des répercussions mondiales ? Non, on ne peut pas expliquer ce système aussi simplement. J’ai donc décidé d’examiner la question plus avant. Comme j’ai des goûts très précis quand il s’agit de choisir mon café, il m’arrive souvent de payer 80 francs pour un kilo de grains dans une petite brûlerie. Vous me trouvez fou ? Lâchez-vous dans les commentaires. J’évite aussi de me faire escroquer, puisque la plupart des brûleries connaissent l’origine de leur café brut à l’hectare près, ou presque. La situation est toute autre chez les grossistes, qui considèrent le café comme une marchandise au même titre que l’or, le cuivre ou le zinc.
Quand il parle du prix du café, Pascal Herzog sonne comme un banquier. Mais lorsqu’il parle du produit lui-même, on sent que c’est un passionné. Je l’ai rencontré dans la salle d’attente stylée de Vicafe à Zurich. Les mots « Fundamentals », « Futures » et« café arabica » ont été prononcés. Après des études d’économie à Saint-Gall Pascal Herzog a intégré le marché du café. C’est là qu’il a acquis son jargon financier. Aujourd’hui, il est membre de la direction et responsable des ventes chez Vicafe. « La météo brésilienne est décisive lorsqu’il s’agit de déterminer les prix du café arabica. Mais la situation économique et les monnaies le sont tout autant », m’a-t-il dit.
Tous ces facteurs externes déterminent le cours mondial du café arabica, et donc les prix des diverses qualités du produit. Ces prix sont surtout intéressants pour les grands importateurs, les multinationales de l’alimentation et les spéculateur·rices. Le marché mondial, des salaires décents et l’agriculture durable n’y sont pas des critères déterminants. À cela s’ajoute, comme l’a mentionné le reportage de la SRF, le fait que les détaillants qui proposent leur café à des prix très faibles ne peuvent pas amortir les fluctuations de prix. Le calcul est simple : si le café brut coûte presque aussi cher à l’achat que le produit final, la marge fond comme neige au soleil, ce qui peut se produire dans les grandes surfaces. Et on ne peut pas garantir non plus que les producteur·rices de café ont gagné quoi que ce soit.
Les labels comme Max Havelaar garantissent dans une certaine mesure aux consommateur·rices que le café a été acheté à un prix équitable, et que les producteur·rices s sont mieux payé·es. L’approche de Vicafe et d’autres petites brûleries est encore plus équitable, car ils se procurent directement le café à la plantation.
« Le cours du café ne joue presque aucun rôle pour Vicafe », m’a expliqué Pascal Herzog. Il poursuit ses affaires comme par le passé. « Nous nous rendons auprès des producteur·rices et nous leur demandons à quel prix ils doivent vendre leur café vert. Ensuite, nous nous rendons chez les exportateur·rices, nous leur posons la même question, et ainsi de suite. Par exemple, l’agriculteur·rice nous dit qu’il doit obtenir 3 dollars la livre, l’exportateur·rice 20 centimes, et l’importateur·rice 20 centimes. En additionnant ces montants, on obtient le prix final du café vert brut que nous torréfions, emballons et vendons. » Ce prix est dans tous les cas plus élevé que le cours sur les marchés boursiers. « On parle d’outright price, ou prix d’achat direct. Nous n’achetons pas le café à la bourse ou via des enchères, comme le font les grands commerçants. »
Le contact direct du cours joue un rôle malgré tout, ce qui inquiète Pascal Herzog. « Si les prix de tous les cafés colombiens se mettent à grimper soudainement, Oscar, notre producteur·rice de café colombien, nous demandera bien entendu plus d’argent. Si nous ne sommes pas prêts à payer ses tarifs, il ou elle cherchera des partenaires qui paieront le prix colombien normal. »
Vicafe a donc dû augmenter le prix de ses cafés. L’entreprise a choisi un modèle non conventionnel. « Nous calculons une marge fixe. Au lieu de calculer un pourcentage, nous prenons un montant fixe en francs par kilo. Les prix plus élevés du café vert ne nous profitent pas, et nous protégeons un peu nos client·es. » Pascal Herzog explique sa stratégie dans la vidéo ci-dessous.
Les contrats que conclut Vicafe avec ses partenaires font eux aussi monter les prix. En effet, il ne s’agit pas de contrats à long terme, mais plutôt d’accords conclus par une poignée de main. En fin de compte, Vicafe peut établir ses calculs de sorte que le prix conclu reste valable à moyen terme, pendant un an ou plus. Les producteur·rices amortissent leurs frais d’exploitation : salaires équitables, loyers et entretien de la ferme et des équipements. Lorsque le cours du café varie, les conséquences sont moins dramatiques, car les frais d’exploitation sont couverts.
Tout le monde semble y gagner. Est-ce trop beau pour être vrai ? Pascal Herzog rigole : « Notre modèle d’affaires comporte bien entendu des risques. Si une récolte est perdue à cause de facteurs environnementaux comme les maladies ou la météo, nous devons très rapidement trouver d’autres solutions. C’est moins grave pour les grossistes ; une mauvaise récolte parmi des milliers de fournisseurs ne change pas grand-chose. Pour nous, c’est différent. » Heureusement, ces cas sont rares. Au pire, l’entreprise pourrait piocher dans le café vert en stock pour fournir à ses client·es leur mélange préféré. La situation serait plus complexe en ce qui concerne les cafés de spécialité, car l’entrepôt pourrait rester vide quelques semaines.
Changement de décor. Des sacs de café non torréfié s’entassent dans un ancien atelier des CFF. Un torréfacteur ronronne dans un coin. « Chez nous, la durabilité ne s’arrête pas avec le grain, nous explique Ramon Schalch, directeur de Vicafe, en me montrant un petit sac de 30 kilos. Nous avons un projet pilote en Tanzanie. Nous y transformons des sacs de 60 kilos en sacs de 30 kilos qui réduisent les charges à porter de moitié pour faciliter le transport. Et tout est produit localement au lieu d’être importé outre-mer. Nous avons même trouvé une solution locale auprès d’une entreprise qui fabrique des filets antimoustiques pour produire des sacs tapissés de plastique qui conservent les arômes. »
Grâce à cette initiative, Vicafe soutient les commerces locaux, au-delà des producteur·rices de café. « On peut dire qu’on fait les choses jusqu’au bout. Peu de brûleries sont aussi investies. » Le banquier a fait place au passionné de café, sensible aux conditions de vie des agriculteurs dans les plantations de café.
Lorsque j’ai quitté le cocon familial il y a plus de 15 ans, je n’ai pas eu d’autre choix que de me mettre à cuisiner pour moi. Cela dit, il ne m’aura pas fallu longtemps avant que cette nécessité devienne une vertu. Depuis, dégainer la cuillère en bois fait partie intégrante de mon quotidien. Je suis un vrai gastronome et dévore tout, du sandwich sur le pouce au plat digne d’un restaurant étoilé. Seul bémol: je mange beaucoup trop vite.