

Délit de fascias: les rouleaux-masseurs

Longtemps ignorés, les fascias jouent pourtant un rôle majeur dans l'entraînement physique, surtout depuis que tout le monde utilise les rouleaux en mousse, des employés de bureau tendus aux athlètes professionnels. Comment se fait-ce? Comment cela fonctionne-t-il? Quels sont les bénéfices? Et surtout, qu’est-ce que les fascias?
Les quoi? Les fascias. Lorsque j’ai expliqué au bureau que j’allais rédiger un texte sur la fasciathérapie, certains collègues étaient perplexes. Il est vrai que tout le monde connaît les produits de Blackroll & Co. Ils sont utilisés dans le cadre d’activités de loisirs, dans le domaine professionnel et le secteur de la rééducation. D’ailleurs, pendant les semaines à venir, j’irai me promener dans notre assortiment pour tester quelques produits. Mais avant toute chose, j’aimerais expliquer pourquoi il y a autant de battage autour de l’entraînement des fascias. À cet effet, j’ai pris rendez-vous avec Melissa Stickel, kinésithérapeute et entraîneuse avec rouleau au Physiozentrum à Zurich.
Melissa, qu’est-ce que les fascias?
«Les fascias s’apparentent à une peau intérieure. Ils constituent un élément particulier du tissu conjonctif entourant muscles, tendons, os et organes. Sans eux, nous ne pourrions pas nous tenir debout. Seul le système nerveux présente un réseau similaire qui parcourt tout le corps, du crâne aux orteils. Plus le système fascial est mauvais, et plus nos mouvements le sont aussi.»
Ces membranes sont-elles passives?
«Non, les fascias ont bel et bien une fonction active. Elles transmettent aux muscles et au système nerveux central des informations telles que position et orientation et influencent la contraction musculaire. De plus, elles peuvent transporter de la lymphe et d'autres fluides, activer le métabolisme et stimuler la circulation sanguine.»

L’engouement pour les tissus conjonctifs
Si les fascias existent, c’est qu’il y a une bonne raison. Peut-on appliquer cet adage à tous les produits censés nous apporter un bien-être? Le tissu conjonctif faisant partie intégrante du corps, les exercices d'étirement dynamique et les massages s’inscrivent donc depuis longtemps dans le répertoire classique du sport et de la thérapie. Au cours de mes quatre années d’études en éducation physique, je n’avais jamais vu de tels rouleaux pour fascias et le tissu conjonctif appliqué au domaine de l’entraînement n’était pas non plus une priorité. Deux ans plus tard, ces objets omniprésents plutôt simplistes sont utilisés:
- pour l’amélioration de la souplesse;
- pour le rétablissement des déséquilibres musculaires (déséquilibre entre les muscles agonistes et antagonistes ou entre les muscles des côtés gauche et droit du corps);
- lors d’un échauffement avant un entraînement ou une compétition;
- pour la régénération active après sollicitation des muscles;
- en combinaison avec des exercices de force physique et de coordination.
Je suis parfois sceptique lorsqu’on s’emballe pour quelque chose, par exemple pour la fasciathérapie. Pourtant, je me suis prêté au jeu et j’ai fini par adhérer. Le soir venu, j'aime faire quelques exercices avec ce rouleau qui m’apporte, en toute subjectivité, relaxation et sensation de bien-être. D’un point de vue objectif maintenant, la recherche n'est pas encore assez avancée pour justifier l'ampleur d’un tel succès. Malgré la constatation d’effets positifs sur la mobilité et la régénération, des études fiables font toujours défaut. J’aimerais que Melissa m’explique pourquoi son utilisation connaît un tel boom.
Doit-on cet engouement à de nouvelles découvertes scientifiques ou à un marketing adéquat?
«Cela fait dix ans à peine qu’on a pu démontrer l’importance des fascias dans le corps. Par la suite, l’enthousiasme face aux rouleaux est littéralement monté en puissance, et des termes comme «fasciathérapie» et «entraînement des fascias» sont apparus. Ces instruments sont pleins de promesses. Bien que le rouleau accompagne et complémente un entraînement, il ne remplace aucunement toutes les autres activités sportives. Ce n’est rien d’autre qu’un rouleau après tout.»
Que se passe-t-il concrètement lorsqu’on le fait rouler sur les différentes parties du corps?
Le passage du rouleau permet de compresser les tissus et de créer une sorte d'effet d'éponge. Cette pression exercée favorise l’alimentation en liquide riche en oxygène et en nutriments des cellules ainsi que le réalignement et le réapprovisionnement des fibres. La régénération musculaire s’accélère et les courbatures s’estompent. Des exercices réguliers permettent l’amélioration des interactions des couches, fibres et faisceaux musculaires et l’augmentation de la mobilité.
Le concept d’adhérence revient souvent à la charge. Ces dernières sont censées se relâcher à nouveau.
Le terme adhérence n’est peut-être pas le plus opportun. Il s’agit plus d’un feutrage, la structure se désordonne, un peu au même titre qu’un petit tas de spaghettis enchevêtrés. Par exemple, le fait d’être penché à son bureau pendant une période prolongée favorise le rapetissement des muscles de l’épaule et de la poitrine. Dans cette région se forment alors des nodules en groupes, responsables d’un durcissement et d’un épaississement du tissu. C’est là que des points gâchette surviennent.

L’expression «point gâchette» revient souvent sur la table. Ces régions sont particulièrement sensibles à la pression. Quelles sont les zones de formation privilégiées de ces points?
«D’habitude, ces derniers se forment à la base du tendon musculaire ou de la sangle abdominale. Le principal avantage du rouleau? La possibilité de doser soi-même la pression et de détecter ainsi les points gâchette. En cas de douleur aiguë, je conseille néanmoins une utilisation sous surveillance.
Dans quels cas doit-on éviter le rouleau?
«Il faut éviter d’utiliser cet instrument en cas d'inflammations aiguës se manifestant par des rougeurs, des gonflements et des douleurs. Il existe en outre des contre-indications sujettes à discussion telles que grossesse, varices ou ostéoporose. Même dans de pareils cas, l’utilisation n'est généralement pas exclue. On pourra alors opter pour un rouleau plus souple exerçant moins de pression.»
Les débutants peuvent-ils se lancer tout de suite?
«Il faut limiter la pression en prenant davantage appui. Une certaine tension du corps est également nécessaire. Le traitement des chaînes musculaires traversant plusieurs articulations représente une séance d'entraînement complète. Cependant, pour éviter que l’exercice ne soit contre-productif, il faut contracter sa posture et ne pas s’avachir. Des roulements effectués sur les zones sensibles donnent lieu à de bonnes douleurs et donc, à un sentiment de bien-être.

À quelle fréquence doit-on utiliser le rouleau pour obtenir des résultats?
«De deux à trois fois par semaine pendant 20 minutes maximum. Il faut éviter les roulements sur les articulations, les périodes prolongées sur un point (maximum deux minutes) en particulier au risque d’interrompre la circulation sanguine. Si les effets se font trop sentir au début, il convient alors de prévoir une pause de deux jours avant de reprendre l’entraînement. Mais attention, une utilisation irrégulière n’apporte aucune amélioration.
Comment varier les exercices?
«Une lente sollicitation tridimensionnelle des fascias est primordiale, il faut donc procéder à des roulements verticaux et horizontaux».
Comment choisir le rouleau? Il existe différents degrés de dureté et de structures de surface.
«Cela dépend un peu de sa propre perception de la douleur. Certaines personnes sont très sensibles et réagissent immédiatement, les athlètes musclés ont souvent besoin d’une pression supérieure. Les débutants, quant à eux, pourront opter pour un rouleau standard ou plus mou.

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Première conclusion
Comme pour beaucoup de gens, l’expérience m’a appris que les premières séances d'exercices peuvent s’avérer très douloureuses. Mais petit à petit, le corps s’habitue et on apprend à doser la pression avec plus de précision. La fasciathérapie n’est pas un remède miracle qui remplace un entraînement sportif, mais représente en revanche un complément non négligeable. De ce fait, il n’est pas étonnant que les fabricants lancent constamment de nouveaux produits sur un marché en plein essor: c’est notamment le cas des rouleaux avec noyau vibrant. C’est à se demander si un tel équipement présente des avantages et sert à quelqu’un. Je vous en dirai plus à ce sujet au cours des prochaines semaines.
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Écrivain amateur et père de deux enfants, j’aime être en mouvement et avancer en équilibre sur le chemin sinueux de la vie de famille. Je jongle avec plusieurs balles et il m’arrive parfois d’en faire tomber une. Il peut s’agir d’une balle, ou d’une remarque. Ou des deux.