La société derrière "Fortnite" lance son propre magasin de jeux avec des conditions extrêmement attractives pour les développeurs. Steam doit-il se méfier et qu'est-ce que cela signifie pour nous, les joueurs ?
Quel tollé lorsque nous avons dû installer Steam juste pour jouer à "Half-Life 2". Quatorze ans plus tard, il n'en reste plus rien. Steam domine le marché du PC avec plus de 125 millions d'utilisateurs (en 2015). Aujourd'hui, un autre développeur de jeux pourrait contester le trône de Valve, la société derrière Steam. Epic a présenté mardi l'Epic Games Store. Epic est connu pour "Unreal Tournament", "Gears of War", ah oui, et un petit jeu appelé "Fortnite". La nouvelle boutique en ligne proposera dans un premier temps des titres triés sur le volet, puis ouvrira progressivement ses portes au cours de l'année prochaine. La boutique d'Epic ne sera pas seulement disponible sur PC et Mac, mais aussi sur Android.
EA, Ubisoft, CD Projekt Red, Microsoft : ils ont tous leur propre magasin. Qu'est-ce qui pourrait être différent chez Epic, pensez-vous. D'une part, il y a les 200 millions de joueurs inscrits pour le jeu probablement le plus populaire du monde. 8,3 millions étaient déjà en ligne simultanément aux heures de pointe. Deux jeux gratuits sont également offerts chaque mois. En outre, Epic met les bouchées doubles pour attirer les développeurs de jeux. Depuis juillet, ceux qui créent des assets pour le Store avec l'Unreal Engine d'Epic ne doivent plus payer 30 pour cent du produit de la vente, mais seulement 12 pour cent. Cette décision est rétroactive et s'applique aux quatre dernières années. L'Epic Games Store s'inscrit dans cette logique. Ceux qui y vendent leur jeu peuvent conserver 88 pour cent des recettes. Que ce soit sur Steam, Google Play Store ou iTunes, le standard de l'industrie est de 70/30.
Une énorme base d'utilisateurs, certes jeune mais apparemment très encline à l'achat, combinée à des conditions extrêmement attractives pour les développeurs ne sont pas de mauvaises conditions si l'on veut bousculer le marché des jeux. Selon une étude de lendEDU, une société de prêts étudiants, 69 pour cent des joueurs ont dépensé de l'argent dans "Fortnite" - en moyenne 85 dollars. C'est énorme!
La boutique d'applications d'Epic pourrait également avoir un impact considérable sur Android, et plus précisément sur le Google Play Store. Alors que dans de nombreux pays asiatiques, il est normal d'utiliser différents magasins d'applications sur son smartphone, dans nos contrées, personne n'a pu s'imposer face au Google Play Store. Comme tous les joueurs de "Fortnite" sur Android ont déjà dû installer manuellement l'Epic Launcher, Epic a déjà un pied dans la porte. Et tout comme sur PC, l'appareil mobile d'Epic est extrêmement attractif pour les développeurs. Outre une meilleure marge, ils bénéficient d'une bien meilleure visibilité. Le Google Play Store et Steam sont tous deux submergés par des centaines, voire des milliers de nouveaux jeux chaque jour.
Quelques jours avant l'annonce d'Epic , Valve a annoncé qu'il allait également distribuer plus d'argent aux développeurs. Ceux dont le jeu rapporte entre 10 et 50 millions de dollars ne devront plus verser que 25 pour cent à Valve au lieu de 30. Au-delà de 50 millions, ce n'est plus que 20 pour cent. Pour tous les autres, la bonne affaire reste inchangée. Les grands studios sont les premiers à profiter de la nouvelle réglementation. Valve veut probablement s'assurer que les hitters lourds comme "PUBG", "Warframe" ou "Rainbow Six Siege" restent sur Steam et ne partent pas à la concurrence. C'est déjà arrivé avec "Call of Duty", qui n'est plus sorti sur Steam cette année, mais a été distribué exclusivement via le service Battle.net d'Activision Blizzard. Fallout 76" n'a pas non plus trouvé le chemin de Steam, même si Bethesda garde cette option ouverte.
Activision Blizzard et Bethesda sont loin d'être les seuls à avoir lancé leurs propres boutiques de jeux numériques. EA a son Origin Store et Ubisoft son Uplay. La plupart du temps, on n'y trouve que des jeux des fabricants respectifs, mais CD Projekt Red ("The Witcher") a créé avec GOG un magasin à succès où l'on ne trouve plus seulement des classiques restaurés. Microsoft dispose également de quelques chevaux de bataille avec le Windows Store et des jeux comme "Forza Horizon", "Sea of Thieves" et le prochain "Crackdown 3".
Discord est également à surveiller de près. L'application est passée en peu de temps du statut d'alternative à Team Speak à celui de nouveau terrain de jeu social pour les joueurs. Aujourd'hui, Discord n'est plus seulement utilisé sur PC, mais aussi sur appareil mobile et sur consoles. 130 millions d'utilisateurs. Il n'est donc pas surprenant que Discord ait également ouvert une boutique en octobre. Le choix de jeux est encore modeste et se compose en grande partie de titres indépendants, mais il ne faut pas sous-estimer l'attractivité de la plateforme.
Il est également intéressant de noter que derrière plusieurs de ces boutiques se trouve la même entreprise chinoise : Tencent. En Chine, l'entreprise est principalement connue pour Wechat et QQ, les deux plus grands services de messagerie au monde. Sans faire beaucoup de bruit, l'une des dix entreprises les plus précieuses s'est largement développée dans le secteur des jeux ces dernières années. En 2012, Tencent a acheté 48 pour cent d'Epic Games. Tencent a également apporté sa contribution aux 30 millions de dollars qui ont servi de capital de départ à Discord. Et l'influence chinoise ne s'arrête pas à ces deux entreprises. Riot Games, les créateurs de "League of Legends", appartiennent également à Tencent. Pour la modique somme de 8,6 milliards, les Chinois se sont également offert il y a deux ans plus de 80 pour cent de Supercell, qui fait tourner les caisses avec "Clash of Clans" et "Clash Royale". Tencent détient également des parts minoritaires dans Ubisoft, Activision Blizzard et Bluehole, qui lance "PUBG", le plus grand concurrent de "Fortnite".
Une concurrence accrue se traduit souvent par une meilleure offre et de meilleurs prix. Les joueurs et les développeurs pourraient donc être les vrais gagnants de cette lutte de pouvoir. L'abandon de la formule 70/30 peut être considéré comme un succès en soi. Mais peu de gens profitent encore de cette répartition. Steam a en outre une énorme longueur d'avance, tant en termes d'acheteurs que de boutique. La plupart des autres boutiques manquent cruellement du droit de retour, que Steam n'a mis en place que depuis quelques années. Avec "Counter-Strike : GO", "Dota 2" et "Team Fortress 2", trois des jeux les plus populaires appartiennent à l'entreprise elle-même. Cette gigantesque bibliothèque ne sera pas non plus contestée de sitôt par Steam. Néanmoins, au siège de Valve, tout le monde suivra de très près l'évolution du Game Store d'Epic. Comment voyez-vous les choses ? Où va le développement ? Steam sera-t-il remplacé par Epic ou le service pourra-t-il conserver sa position dominante ?
La boutique d'Epic Games est-elle dangereuse pour Steam ?
Le concours est terminé.
En tant que fou de jeu et de gadgets, je suis dans mon élément chez digitec et Galaxus. Quand je ne suis pas comme Tim Taylor à bidouiller mon PC ou en train de parler de jeux dans mon Podcast http://www.onemorelevel.ch, j’aime bien me poser sur mon biclou et trouver quelques bons trails. Je comble mes besoins culturels avec une petite mousse et des conversations profondes lors des matchs souvent très frustrants du FC Winterthour.
