Le Joker n'est pas encore dans nos cinémas, mais il a déjà beaucoup fait parler. Peu de films ont suscité une telle controverse. La question est de savoir si les assassins et tueurs en série, bien que totalement fictifs, peuvent être humanisés.
Le Joker de DC interprété par Joaquin Phoenix a lancé le débat, du moins aux États-Unis. Le film n'est cependant pas encore sorti en salle son lancement étant prévu pour le 4 octobre 2019. Et encore une semaine plus tard chez nous.
Joaquin Phoenix incarne le Joker, ennemi juré de Batman. Source : Warner Bros.
La controverse en question ne porte pas sur la qualité du film. En fait, nombre de ceux qui ont déjà vu le film auraient assisté à une performance digne d'un Oscar dans l'interprétation du Joker par Joaquin Phoenix. La question est plutôt de savoir si l'on peut sympathiser avec les tueurs en série.
Critiques inquiets : des assassins dans le rôle de victime
Au cœur de l'inquiétude, l'intrigue du film mettant en scène l'ennemi de Batman ayant prêté son nom au film, ce dernier est présenté comme un comédien en herbe qui perd le contrôle de sa vie et devient un assassin dérangé. Les détracteurs craignent que le Joker n'éveille de la compassion et de la sympathie pour le personnage, en faisant un modèle, voire une source d'inspiration, pour d'autres auteurs potentiels de violence qui voudraient se considérer comme victimes du système.
La récente série de tueries de masse par arme à feu ayant fait plus de 40 victimes aux États-Unis ne manque pas d'apporter de l'eau au moulin des détracteurs. À cela s'ajoute le tragique incident d'Aurora (Colorado), une attaque à main armée indirectement liée au Joker : l'attaquant a lancé une grenade lacrymogène lors d'une représentation nocturne du film The Dark Knight Rises et a tiré sur le public. Douze personnes sont décédées, soixante ont été blessées.
La police new-yorkaise souhaite surveiller le lancement du film et que les cinémas prévoient plus de personnel. La police de Los Angeles a également l'intention de prendre des mesures plus strictes pour surveiller la situation. Les exploitants de salles de cinéma sont également tenus de ne pas autoriser les déguisements ou les masques, ou au moins d'effectuer des contrôles stricts.
À jamais seul au milieu de la foule, Arthur Fleck alias le Joker cherche à quoi se raccrocher. Source : Warner Bros.
Alors que la controverse est incontestablement là, les responsables cherchent à éviter les polémiques. Un policier de New York a par exemple déclaré à la revue spécialisée The Hollywood Reporter qu'il n'y avait aucune preuve formelle d'assassinats planifiés. Même son de cloche du côté de la police de Los Angeles. Elle prend certes très au sérieux les préoccupations de la population, mais n'a pas encore découvert de menaces graves.
Ne serait-ce donc que beaucoup de bruit pour rien ?
Les parties concernées : le studio doit prendre ses responsabilités
Dans une lettre ouverte à Warner Bros., les victimes et familles des victimes de l'attentat d'Aurora s'inquiètent de la violence réaliste du film Joker. Aux États-Unis, le film est classé R, classement équivalent à la catégorie interdite au moins de 18 chez nous. Ils ont également appelé le studio à cesser les dons aux politiques qui reçoivent des fonds de la National Rifle Association (NRA) afin d'empêcher des réformes rendant l'accès aux armes plus dur aux États-Unis.
Ann Sarnoff, PDG de Warner Bros. a répondu que le studio partage la peine des familles et verse, déjà depuis plusieurs années, des dons généreux aux victimes de violence. L'entreprise aurait en effet donné un million de dollars aux victimes d'Aurora.
Madame Sarnoff n'a, en revanche, fait aucun commentaire quant aux supposés dons à des politiciens s'opposant aux réformes sur les armes.
Joaquin Phoenix : la controverse est bonne et saine
Entre-temps, les stars du film se sont également exprimées. Le réalisateur Todd Phillips a ainsi déclaré qu'il n'avait aucunement l'intention de glorifier la violence ou d'inspirer des assassins potentiels, que ce soit par le biais du personnage fictif du Joker ou de son film. L'acteur Robert De Niro a, quant à lui, déclaré au magazine spécialisé Variety, lors de la première du film The Irishman qu'il soutenait les demandes des familles Aurora.
Robert De Niro dans le film Joker Source : Warner Bros.
Premier rôle, Joaquin Phoenix a livré une interview plus détaillée au journal Vanity Fair. Il s'attendait à la controverse, mais la trouve saine, car elle stimule les débats. Il se serait également interrogé sur ses motivations à faire un film sympathise avec le méchant. Sa réponse lui vient d'elle-même dans une interview avec IGN.
Le film Joker parle du manque d'amour, des traumatismes de l'enfance et du manque de compassion dans notre monde. Je trouve bizarre que les gens disent : « Oh, je ferrais avec ». Mais imaginez ce qui se passerait si vous n'y arriviez pas.
Joaquin Phoenix à IGN
La vraie valeur du film serait donc selon Phoenix, de faire comprendre aux gens qu'il est souvent trop facile de dénoncer le mal sans essayer de trouver son origine ou de le comprendre.
La controverse : le bien et le mal existent-ils vraiment ?
La question de savoir si les tueurs de masse – qu'ils soient fictifs comme le Joker ou réels comme James Eagan Holmes, le tueur d'Aurora – peuvent être humanisés est déplaisante et met mal à l'aise.
Selon les acteurs et professionnels ayant participé au film, Joker devrait aider à mieux comprendre le mal, à le reconnaître et à l'empêcher à un stade précoce avant qu'il ne soit trop tard. Les détracteurs et les familles inquiets voient, quant à eux, un danger beaucoup plus grand que les auteurs potentiels de violence se voient confirmés dans leur rôle de victimes et s'en servent comme justification pour d'autres assassinats.
Victimes meurtrières : pitié ou condamnation véhémente ? Source : Warner Bros.
La vérité se trouve sûrement dans l'entre-deux. Aucun meurtrier ne devrait pouvoir être délesté de la responsabilité de ses actes, aussi désespérées soient les circonstances. La décision d'appuyer sur la gâchette est bel et bien prise par le meurtrier, seul. Dans tous les cas.
C'est cependant à nous, qui formons la société et éduquons nos enfants selon nos principes moraux, d'assurer une coexistence saine. Cela ne peut fonctionner que si nous trouvons tous ensemble suffisamment de soutien, même dans nos heures les plus sombres, avant qu'il ne soit trop tard.
Qu'en pensez-vous ?
L'humanisation des meurtriers
Peut-on comprendre les assassins de masse ?
Oui - ils sont des hommes au même titre que nous et sont devenus ce qu'ils sont pour une raison, même si c'est terrible.
14%
Non - les tueurs ont renoncé à leur humanité et perdu le droit d'être perçus comme des êtres humains.
6%
Ni l'un ni l'autre – il ne s'agit pas de les absoudre de leur culpabilité. Il s'agit de comprendre comment ils sont devenus ce qu'ils sont et ce que nous, en tant que société, pouvons faire pour prévenir cela à l'avenir.
80%
Le concours est terminé.
N.B. : connaissez-vous la série Netflix Mindhunter ? Elle raconte l'histoire des premiers profilers de l'histoire qui se sont intéressés au psychisme des tueurs en série – contre la pression de la société, qui ne veut rien savoir de l'humanisation des tueurs.
Vivre des aventures et faire du sport dans la nature et me pousser jusqu’à ce que les battements du cœur deviennent mon rythme – voilà ma zone de confort. Je profite aussi des moments de calme avec un bon livre sur des intrigues dangereuses et des assassins de roi. Parfois, je m’exalte de musiques de film durant plusieurs minutes. Cela est certainement dû à ma passion pour le cinéma. Ce que j’ai toujours voulu dire: «Je s’appelle Groot.»